Dignitas Personae

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Au tournant du XXIe siècle, de nouvelles technologies permettent aux couples stériles de soulager leur souffrance de ne pas avoir d’enfants. Des techniques de fécondation in vitro ont grandement amélioré leurs taux de succès et d’autres manières de faire, telles que l’injection intracytoplasmique de spermatozoïdes et la congélation d’embryons se présentent comme des avancées scientifiques remarquables. De nouvelles propositions thérapeutiques qui comportent la manipulation de l’embryon ou du patrimoine génétique humain ouvrent des perspectives thérapeutiques pour la médecine régénérative et pour le traitement de maladies à base génétique et suscitent un grand intérêt, même si ces recherches sur les cellules « n’ont pas fourni jusqu’à ce jour des preuves de leur effectivité dans le champ clinique »[1].

L’Église, en s’appuyant sur la lumière de la raison et de la foi, propose cependant un jugement moral sur ce « progrès scientifique » qui tienne compte d’une « vision intégrale de l’homme et de sa vocation[2] ». C’est dans le but de répondre à « certaines questions » soulevées par ces dernières « avancées scientifiques » que la Congrégation pour la doctrine de la foi élabore, en 2008, l’Instruction Dignitas Personae, qui se veut une mise à jour de Donum Vitae, autre instruction qu’elle avait fait paraître une décennie plus tôt.Ce nouveau document à caractère doctrinal se veut un complément aux encycliques Veritatis Splendor et Evangelium Vitae, du pape saint Jean-Paul II. Si les deuxième et troisième chapitres présentent en détail les arguments moraux pour rejeter à la fois les techniques qui modifient à long terme la génétique humaine sans en connaître les conséquences et celles qui provoquent volontairement la mort d’embryons humains en ne les considérant pas à juste titre comme des êtres humains à part entière, la Congrégation consacre d’abord son premier chapitre à « certains aspects anthropologiques, théologiques et éthiques de la vie et de la procréation humaine ». C’est ce chapitre qui retiendra la suite de notre attention.

Le droit à la vie et à l’intégrité physique

Dignitas Personae, comme son titre l’indique, rappelle que « l’embryon humain a, dès le commencement, la dignité propre à la personne[3] ». Si la congrégation, dans l’Instruction Donum Vitae, n’avait pas défini textuellement l’embryon humain comme une personne afin « de ne pas s’engager expressément dans une affirmation de nature philosophique[4] », il n’en demeure pas moins qu’elle y avait déclaré que le commencement de la personne humaine coïncidait avec l’instant précis de la fécondation :

« Le fruit de la génération humaine dès le premier instant de son existence, c’est-à-dire à partir de la constitution du zygote, exige le respect inconditionnel moralement dû à l’être humain dans sa totalité corporelle et spirituelle.[5]»

Donum Vitae, no. 79

            La dignité de la personne, corps et âme, à laquelle la raison, guidée par la loi naturelle, exige le respect, est « encore plus accentué et renforcé » par la sanctification du corps humain réalisée par l’Incarnation du Verbe Divin. « Le Christ n’a pas dédaigné le corps ; il en a pleinement révélé le sens et la valeur : en réalité, le mystère de l’homme ne s’éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe Incarné[6] ».  La personne humaine est donc composée d’une dimension biologique hautement digne de respect, mais elle est aussi image du Christ et image de Dieu, qui lui confère une valeur inviolable. Par le simple fait qu’il existe, chaque être humain doit être pleinement respecté, car l’homme « a une vocation éternelle et est appelé à communiquer l’amour trinitaire du Dieu vivant ».[7]

La procréation d’une personne humaine doit être poursuivie comme le fruit conjugal spécifique des époux

            C’est seulement dans le mariage, institution reconnue « de tous les temps et de toutes les cultures[8] » et inscrite dans la loi naturelle, que peut véritablement s’épanouir un être humain. Le mariage chrétien élève et sanctifie cette institution universelle et naturelle en la rendant participante au plan divin de la Création : « L’Esprit Saint répandu au cours de la célébration sacramentelle remet aux époux chrétiens le don d’une communion nouvelle, communion d’amour, image vivante et réelle de l’unité tout à fait singulière qui fait de l’Église l’indivisible Corps mystique du Christ[9] ». En définitive, « l’unité du mariage implique le respect mutuel du droit des conjoints à devenir père et mère seulement l’un à travers l’autre[10] » ; la transmission de la vie humaine vraiment conforme à la morale et au plan de Dieu n’est possible que dans le cadre du don mutuel de soi que réalise la fécondité de l’amour conjugal. 

Conclusion

Le respect de la dignité de la personne humaine dès la fécondation et le caractère sacré de la sexualité humaine et du mariage sont les deux critères sur lesquels l’Église appuie son analyse des nouvelles questions relatives aux avancées technologiques et de la science médicale. Elle encourage les recherches et les investissements consacrés à la prévention de la stérilité[11], tels que les traitements hormonaux qui corrigeraient les carences des parents et ramèneraient les taux hormonaux à des valeurs normales. Elle témoigne de sa sollicitude envers la souffrance des couples stériles et elle déclare à nouveau qu’il « serait souhaitable d’encourager, de promouvoir et de faciliter, avec des mesures appropriées, la procédure d’adoption des nombreux orphelins qui ont besoin d’un foyer domestique pour leur adéquate croissance[12] ».

« Une partie non-négligeable des cas d’infécondité qui se présentent au médecin, chez la femme comme chez l’homme, pourraient en fait être évités, si la vertu de chasteté était vécue plus fidèlement, si les sujets adoptaient un style de vie plus sain, et si les facteurs de risque aux niveaux professionnels, alimentaire, pharmacologique et écologique étaient limités »[13].

Dignitas Personae, no. 13

            L’enseignement de l’Église est fondé « sur la reconnaissance et sur la promotion des dons que le Créateur a donnés à l’homme, tels que la vie, la connaissance, la liberté et l’amour[14] ». Il est injuste que l’opinion publique, soutenue par la plupart des médias de masse, fassent tourner un enseignement en faveur de la vie en un enseignement contre des avancées techniques qui ne tiennent pas compte de toute la personne humaine et hiérarchisent la valeur de la vie humaine en fonction de leur phase de développement ou qui discriminent et mettent en danger la vie d’êtres humains qui présenteraient un « défaut » de développement. Tous les dons reçus du Créateur doivent évidemment être ordonnés au Bien, puisqu’ils proviennent du Bien. On ne peut faire ce qu’on veut d’un don qu’on reçoit. Il faut le traiter avec bienveillance et autant de respect qu’on puisse avoir envers celui qui nous le fait. C’est peut-être là la source de bien des problèmes d’ordre bioéthique : nos sociétés semblent avoir perdu le respect envers Dieu, Source éternelle de Vie et d’Amour.


[1] CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI. Dignitas Personae, 2008, no. 24.

[2] Ibid., no. 3

[3] Ibid., no. 5.

[4] Ibid.

[5] CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI. Donum Vitae. 1987, no. 79

[6] CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Const. past. Gaudium et Spes, no. 22 ; in CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI. Dignitas Personae no. 7

[7] Dignitas Personae, no. 8.

[8] Ibid. no. 6.

[9] SAINT JEAN-PAUL II, Exhortation apostolique post-synodale « Familiaris Consortio », 1981, no. 19.

[10] Dignitas Personae, no. 12.

[11] Dignitas Personae, no. 13.

[12] Ibid.

[13] Ibid.

[14] Ibid., no. 36.

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