Pour qui les chrétiens se prennent-ils ?

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Les Québécois n’aiment pas la chicane. Tous les Québécois ont appris que lors d’une soirée entre amis, il ne faut pas aborder les sujets sensibles que sont la religion et la politique. Tout le monde a appris que ces deux sujets divisent et nous forcent à prendre position selon nos valeurs profondes et à les défendre, au besoin. Ainsi, si nous ne voulons pas nous chicaner, mieux vaut ne pas aborder ces deux sujets.

À une époque où notre fil d’actualités Facebook ne nous présente que ce qui nous plaît, et que ces choses que nous trouvons déplaisantes seront de moins en moins affichées (car on le sait bien, un client contrarié n’achète pas!), la plupart de nos amis servent à nous conforter dans nos opinions et nous n’avons pas appris à débattre de nos idées dans le respect et le désir de trouver ce qui est vrai. Dans notre société de consommation, nous lynchons à la télévision nationale, à heure de grande écoute, les gens qui ne pensent pas comme nous et nous cherchons à nous associer à des gens qui n’oseront pas contredire nos erreurs les plus grossières. Si nous voulons que nos amis nous gardent, mieux vaut alors ne pas traiter ces sujets qui risquent de mettre en péril notre cercle social!

« C’est ton choix, après tout, si ça te rend heureux… ».

religion c'est comme un pénis
« La religion, c’est comme un pénis : C’est bien d’en avoir un, c’est bien d’en être fier, mais ne le sortez pas en public, ne touchez pas les enfants avec, n’écrivez pas de lois avec, ne pensez pas avec. » Source image: Pinterest.

Pourtant, on ne peut être vraiment ami avec quelqu’un dont nous ne partageons pas les valeurs. J’ai de nombreux amis qui ne cherchent pas vraiment à connaître ces valeurs que je porte depuis que je suis devenu chrétien et n’osent pas aborder directement le sujet. La plupart me disent que nous avons tous nos croyances et qu’au fond, ce qui compte c’est que nous soyons heureux… C’est leur façon de se défiler, de garder la paix et d’éviter ces conversations malaisantes où nous pourrions être confrontés à de profondes divergences d’idées. Dans ce contexte, ils se disent probablement que mieux vaut demeurer discrets, quitte à alimenter en silence des préjugés qui ne correspondent pas du tout à la réalité.

Je peux les comprendre : certains chrétiens se comportent comme les pharisiens dans l’Évangile, fiers de leurs morale et jugeant les pécheurs éloignés de la vérité. Pourtant, un véritable chrétien ne se comporte pas ainsi. Le mot chrétien signifie : « qui appartient à Christ », ou encore « de Christ ». Pourtant, s’il y a bien une catégorie de gens que Jésus Christ a condamné explicitement, c’est celle des religieux parfaits, du moins en apparence! Ainsi, un véritable disciple du Christ devrait plutôt regarder les pécheurs avec bienveillance, partageant un repas avec eux et donnant jusqu’à sa propre vie pour peut-être les convaincre de la vérité du message du Christ…

Peur de perdre sa liberté

Bien peu de Québécois savent faire la différence entre spiritualité et religion. Pour bon nombre de mes amis, la spiritualité mène invariablement à adopter un ensemble de règles morales et de comportements qui régissent ceux qui se réclament d’une religion : les juifs mangent casher, les musulmans ne mangent pas de porc et les chrétiens doivent tout pardonner, toujours. S’ils osaient ouvrir la Bible, certains semblent croire qu’ils auraient le cerveau complètement lavé, perdant absolument leur raison et leur jugement. Pourtant, ceux-là ne craignent absolument pas de perdre leur sens critique en lisant Da Vinci Code ou un article « scientifique » trouvé sur internet… Certains d’entre eux ne se poseront même pas la question à savoir dans quel but ces textes ont été écrits et à quel auditoire ils s’adressent… Quant à ceux qui oseront, ils ne devraient pas s’inquiéter outre mesure de ce qu’ils y trouveront et peuvent faire confiance à leur capacité de raisonner!

Si mes amis avaient le courage de me demander si les catholiques croient que la Terre a été créée en 7 jours il y a 8000 ans, je leur pourrais alors leur répondre avec assurance que l’Église enseigne que la Bible n’est pas un manuel de science ou d’Histoire! Au contraire, lorsqu’on commence à s’intéresser à la Bible, on apprend plutôt à chercher le contexte de rédaction de chaque texte : le style adopté (poésie, épopée, etc.), l’année de rédaction, l’auditoire visé, le contexte politique, etc. Ces informations sont capitales pour ne pas s’y perdre et ne pas le faire serait un risque de prendre au sens littéraire une allégorie comme celle de l’arche de Noé!

Arche de Noé
L’arche de Noé est une allégorie et les chrétiens qui croient à l’historicité du récit risquent d’être bien déçus! Source image: site de Playmobil Canada

Une morale repoussante

Néanmoins, on ne peut blâmer mes amis de craindre d’adopter une morale qui paraît rebutante sous plusieurs aspects. Pour les rassurer, je leur dirais que cette morale est une conséquence de ce qui nous arrive après avoir rencontré véritablement Jésus Christ. La partie la plus difficile à expliquer, c’est qu’on a fini par faire une rencontre personnelle avec cet homme-Dieu qui a vécu sur terre il y a 2000 ans… Il est ardu d’expliquer que son enseignement prenne mystérieusement vie dans la nôtre, qu’on reconnaît certaines de ses paraboles dans notre vécu, et qu’on finisse par lui parler comme à un ami. Ce n’est pas imposé, personne ne nous lave le cerveau pour y arriver : un jour, on découvre tout simplement que ça nous est arrivé et que c’est la chose la plus merveilleuse sur terre! Ce n’est qu’à partir du moment où on a fait cette expérience que le fait de vouloir devenir chaste (avec ou sans abstinence sexuelle), de préférer la pauvreté et l’humilité, ou de préserver la vie à tout prix, font vraiment du sens pour nous.

La spiritualité du maître Jésus précède donc de plusieurs milles l’adoption du code moral et éthique des chrétiens. Et soyons honnêtes : tous les chrétiens ont du mal à appliquer parfaitement l’enseignement de Jésus. Même le pape! 😉 Ce qu’on appelle « le péché », c’est précisément cela : rater la cible, se tromper. Jésus est venu pour enseigner la Vérité, et plus nous tentons de le suivre, plus nous nous rendons compte que le chemin sera difficile pour l’atteindre!

Avortement

Mais comment diable peux-tu être contre le progrès? Comment peux-tu te permettre de juger les femmes qui ont eu recours à l’avortement, si celui que tu prétends suivre a bel et bien enseigné de ne pas juger? Tout d’abord, tu dois savoir que lorsque j’éduque mes enfants, je peux désapprouver certains de leurs comportements sans jamais cesser de les aimer profondément. De même que je suis en faveur du bonheur de mes enfants, les chrétiens sont moins CONTRE l’avortement que POUR la protection de la vie. Nous croyons à la valeur de chaque être humain, qu’il soit trisomique, handicapé, complètement légume, vieux, inutile ou criminel. C’est pour cette raison que nous nous objectons aussi à la peine de mort et à l’euthanasie : parce que nous croyons aux miracles, qui sont toujours possibles, surtout quand la science n’offre plus d’espoir ou que plus personne ne pense que quelqu’un ayant commis le crime le plus horrible puisse un jour changer, reconnaître sa faute, demander pardon, et l’obtenir.

Cependant, je dois aussi dire que j’éprouve énormément de compassion pour les femmes qui ont eu recours à l’avortement, pour toutes les raisons que l’on connaît. Supprimer la vie de son propre enfant laisse des marques profondes et ineffaçables dans l’être d’une personne. Ces femmes n’oublient jamais leur enfant et ressentent très souvent une grande culpabilité. C’est donc le devoir de tout chrétien de pleurer avec ces femmes qui souffrent et de les traiter avec respect et humilité.

À ce sujet, il faut connaître l’épisode de la femme qui s’était fait prendre au lit avec un autre homme et qu’on emmena à Jésus :

« Les maîtres de la loi et les Pharisiens lui amenèrent alors une femme qu’on avait surprise en train de commettre un adultère. Ils la placèrent devant tout le monde et dirent à Jésus: «Maître, cette femme a été surprise au moment même où elle commettait un adultère. Moïse nous a ordonné dans la loi de tuer de telles femmes à coups de pierres . Et toi, qu’en dis-tu?» Ils disaient cela pour lui tendre un piège, afin de pouvoir l’accuser. Mais Jésus se baissa et se mit à écrire avec le doigt sur le sol. Comme ils continuaient à le questionner, Jésus se redressa et leur dit: «Que celui d’entre vous qui n’a jamais péché lui jette la première pierre.» Puis il se baissa de nouveau et se remit à écrire sur le sol. Quand ils entendirent ces mots, ils partirent l’un après l’autre, les plus âgés d’abord. Jésus resta seul avec la femme, qui se tenait encore devant lui. Alors il se redressa et lui dit: «Eh bien, où sont-ils? Personne ne t’a condamnée?» – «Personne, Maître», répondit-elle. «Je ne te condamne pas non plus, dit Jésus. Tu peux t’en aller, mais désormais ne pèche plus.» » (Jean 8, 3-11)

La femme adultère, dans le film « La Passion du Christ », de Mel Gibson, est l’illustration la plus poignante que j’ai vues de cette péricope!

Comme vous voyez, Jésus ne condamne pas cette femme, mais il lui dit la vérité : elle a fait une erreur, elle n’aurait pas dû tromper son mari. Mais il ne la condamne pas. Les chrétiens devraient en faire autant avec les gens qui ont des écarts de conduite flagrants.

Les chrétiens détestent-ils les homosexuels?

Les chrétiens sont-ils contre les homosexuels? Non, les chrétiens dignes de ce nom ne détestent personne, pas même ceux qui les pourchassent et leur veulent du mal! Mais cette question est une fausse question. En effet, les chrétiens sont moins CONTRE l’homosexualité que POUR la chasteté. Et c’est ici qu’une précision s’impose, à savoir la différence entre la chasteté et l’abstinence sexuelle. Tous les chrétiens sont appelés à être chastes, mais pas tous sont appelés à être abstinents!

La chasteté, c’est le contraire de la luxure, qui consiste à utiliser le corps d’une autre personne pour combler notre propre besoin sexuel. C’est de voir la sexualité comme un divertissement, une façon de passer le temps. Cette façon de faire laisse à tout coup des marques chez toute personne qui en a fait l’expérience. Souvent, un des deux partenaires aime plus que l’autre et livre son coeur, tandis que l’autre ne s’implique pas personnellement dans la relation (sexuelle), causant un vide et une blessure chez l’autre. Les chrétiens ont appris de Jésus que toute relation repose sur le don de soi. Voilà le grand changement de paradigme qui contredit ce qui est à la mode dans notre monde actuel : plutôt que d’aborder la sexualité dans l’optique d’une satisfaction que je peux y retirer, je la considère dorénavant comme un cadeau précieux que je fais à une personne avec qui je m’engage pour la vie. C’est alors que la sexualité devient chaste : l’autre n’est plus un outil dont je me sers pour jouir, mais une personne avec qui j’accepte de partager tout ce que je suis. Est-il besoin de préciser ici pourquoi cet engagement ne devrait se vivre que dans le mariage…?

Le mariage chrétien ne se vit seulement qu’entre un homme et une femme, parce que les chrétiens croient qu’ils sont faits à l’image de Dieu : homme et femme il les créa (Ge 1, 27). Ensemble, ils participent à créer la vie et à agir en intendants de la Création. Il s’agit d’une vocation, c’est-à-dire un appel (de Dieu) à s’émanciper complètement, à devenir la personne merveilleuse qu’Il sait que nous sommes. Certaines personnes sont faites pour être en couple et d’autres, non. Le Christ nous enseigne que si notre vocation n’est pas de fonder une famille et de nous « supporter » l’un l’autre dans une relation durable et indissoluble, on serait mieux de rester amis… Il me semble que c’est logique, vous ne trouvez pas? Ainsi, si nous nous sentons attiré par une personne du même sexe que nous, nous ratons probablement la cible de notre vocation et il vaudrait mieux rester célibataire que de tenter de s’investir dans une relation presque assurément vouée à l’échec, ou du moins à la stérilité.

Je connais de nombreuses personnes homosexuelles et certains de mes meilleurs amis sont en couple avec une personne du même sexe. Il y a même dans mon entourage une personne transgenre que j’aime énormément! Ce n’est pas à moi de les juger ou de leur dire qui ils devraient aimer ou non. J’ai déjà assez de mes faiblesses et de mes difficultés personnelles, je n’ai pas à leur rappeler constamment l’enseignement de notre mère l’Église, de peur qu’ils ne se mettent à me rappeler à leur tour mes failles et mes incohérences… Mon rôle est plutôt de témoigner de quel amour Dieu les aime, en agissant envers eux de la façon dont Jésus agit : avec amour, patience, compassion.

Nous sommes tous pécheurs, nous nous trompons tous de temps à autre et l’important c’est de progresser ensemble sur le chemin de la sainteté. Qui sait, peut-être les deux hommes qui viennent ensemble à la messe sont-ils abstinents…? Qu’en sais-je? Comment pourrais-je juger? Ce que je sais, par contre, c’est que Dieu nous prend tels que nous sommes et désire nous guider vers le véritable bonheur, éternel!

Les croisades

Plusieurs personnes accusent les religions d’être responsables de toutes les guerres de l’histoire. On nous rappelle que les chrétiens ont autrefois participé à ces guerres saintes qui font les manchettes encore de nos jours. Cependant, bien peu de ces personnes qui nous le rappellent ne feront l’effort de s’informer vraiment sur ce qu’étaient les croisades. Pour leur information, la première croisade fut instiguée en 1095 dans le contexte où des pèlerins avaient été empêchés par les Turcs de se rendre en Terre Sainte, bien qu’ils y avaient été autorisés par les maîtres du lieu, les Arabes Abassides. Des embuscades avaient alors été tendues et beaucoup de sang avait été versé. Il ne s’agissait aucunement d’une guerre idéologique, mais bien d’un conflit géopolitique. Il faut bien faire attention de ne pas confondre les croisades du Moyen-Âge avec ce que l’islam appelle « guerre sainte » (djihad), qui consiste à imposer une religion par la force et la menace.

Bien souvent, ceux-là mêmes qui utilisent l’argument de croisades qui datent de 1000 ans pour discréditer l’authenticité de l’expérience chrétienne, sont ceux qui disent que la doctrine chrétienne est passéiste et réfractaire à l’évolution… Quoiqu’il en soit, un petit détour vers Wikipédia vous permettra de vous faire votre propre idée sur le sujet.

Au fond, les religions n’ont-elles pas toutes le même message?

D’un point de vue philosophique (et que l’on peut donc prouver par l’exercice de la raison ; contrairement à la spiritualité, qui consiste en une expérience personnelle qu’on ne peut ni mesurer ni juger de la véracité), il n’y a qu’une seule vérité qui puisse exister. Chaque individu a la responsabilité de la trouver et je crois, personnellement, que chacun, peu importe sa religion ou sa provenance sociogéographique, peut nous apporter un éclairage sur La Vérité. Jésus enseigne d’ailleurs que les plus petits et vulnérables de notre monde ont beaucoup à nous apprendre au sujet de la vérité.

La foi en la personne de Jésus Christ n’est pas une opinion subjective, mais l’accueil d’une réalité dont toute personne dotée de raison peut juger de la validité ou non. Je suggèrerais à toute personne qui voudrait vraiment comprendre en quoi consiste l’enseignement de Jésus de ne pas avoir peur de ce qu’elle découvrira. La liberté d’adhésion est fondamentale dans la foi chrétienne et aucun chrétien ne saurait vous forcer à croire en ces choses somme toute assez incroyables telles que la résurrection de Jésus de Nazareth, la marche sur les eaux ou la multiplication des pains. Faites confiance à votre capacité de juger par vous-même de la véracité de l’enseignement. Commencez par découvrir la personne de Jésus, en prenant votre temps et en posant beaucoup de questions. Si vous n’êtes pas satisfait des réponses, demandez à un autre chrétien et comparez les réponses jusqu’à ce que vous ayez trouvé la véritable position sur un sujet donné!

Le parcours Alpha est un excellent moyen de découvrir l’enseignement de Jésus tout en rencontrant des gens qui partagent les mêmes préoccupations que tout le monde : trouver l’amour, avoir un boulot satisfaisant et payant, trouver un équilibre entre la famille et toutes les autres priorités qui s’incrustent subtilement dans notre agenda au fil du temps… Les chrétiens ne sont pas au-dessus des autres et ne sont pas déconnectés de la réalité. Ils ont tout simplement fait la rencontre d’un homme qui a dit qu’il est Dieu, et cela a changé leur vie! N’ayez pas peur de leur poser toutes vos questions!

2 réponses

    1. Généralement le texte apporte des nuances auxquelles les catholiques ne sont pas familiers.Sortir d’une fâcheuses habitude de juger plutôt que d’accueillir sans condition est un long apprentissage, exigeant et profondément spirituel. Les catholiques ont commis des exactions? Bien sûr: Inquisition, Croisades etc. Peuvent-ils en être pardonnés? En lisant du même auteur, Yuval Noah Harari, Sapiens et Homo Deus on peut mieux comprendre notre évolution comme humanité. Ses propos ébranlent et déstabilisent mais purifient aussi tout ce qui émerge de nos illusions, de notre imaginaire, de la fiction.

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